Par Philippe Guelpa-Bonaro, vice-président de la Métropole de Lyon au Climat, à l’Énergie et à la Réduction de la Publicité ; président de l’Agence Locale de l’Énergie et du Climat de la Métropole de Lyon. 

GUELPA-BONARO-Philippe

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Dès l’été 2020, après les élections métropolitaines, j’ai repris le travail d’élaboration du Règlement Local de Publicité (RLP) de l’ancienne majorité. Un travail de concertation avec les maires a eu lieu, sur la base d’une relecture des résultats de la concertation préalable de 2018-2019, lors de laquelle de nombreux citoyens et associations de protection du cadre de vie s’étaient manifestés pour demander à réduire la publicité, interdire le numérique ainsi que les grands formats de publicité et augmenter l’amplitude horaire d’extinction des publicités et des enseignes. Ce travail avec les maires a duré une petite année, pour aboutir fin 2021 à un projet de règlement relativement consensuel et équilibré, en cours de validation. 

À noter qu’il y a différentes raisons de vouloir réduire la publicité, et que, du côté droit de l’échiquier politique, la réduction de la publicité peut être synonyme d’amélioration du cadre de vie et d’esthétique urbaine, utile pour créer du consensus politique. 

La sobriété énergétique étant une des priorités de la mandature écologiste sur la Métropole de Lyon, le Règlement Local de Publicité a été pensé et élaboré pour y répondre à plusieurs niveaux. 

Consommer moins 

Le premier objectif du RLP est de réduire les incitations à consommer des biens ou services nocifs pour l’environnement et pour la justice sociale. L’application des règles du RLP devrait permettre la suppression d’au moins 50 % des panneaux de publicité extérieurs existant sur le territoire de la Métropole de Lyon. Sur les secteurs autorisant de la publicité dite « privée » (hors contrat avec les collectivités), les règles d’implantation strictes selon la taille du terrain empêchent le «défilé» de plusieurs panneaux sur les routes structurantes de la Métropole et donc le bourrage de crâne. En réduisant de 12 à 4 m2 la taille maximale des publicités, nous réduisons l’audience potentielle de chaque panneau. Par ailleurs, sur les secteurs résidentiels, là où les gens vivent, se reposent et ne sont pas censés «penser à consommer», la publicité est interdite, hors Mobiliers Urbains d’Information de 2 m2 maximum : «sucettes JCDecaux» et abribus, dont environ 40 % des faces sont dédiées à de l’information d’intérêt général des collectivités. Pour finir, sur les secteurs les plus touristiques et patrimoniaux des villes de Lyon et Villeurbanne, donc les plus fréquentés, une zone spécifique a été appliquée pour y interdire même les mobiliers urbains. Cette forte réduction de la place de la publicité dans l’espace public permet d’alléger cette pression publicitaire subie et inconsciente, créatrice de besoins superflus. 

Moins de panneaux, moins de camionnettes, moins de papier 

La réduction de plus de la moitié des panneaux publicitaires aura aussi un impact favorable sur les dépenses énergétiques liées aux carburants, puisque les tournées de camionnettes actualisant les supports de pub seront plus rapides. On peut aussi penser à la réduction de la consommation de papier, en lien à une forte diminution du nombre et de la taille des panneaux. 

«C’est pas Versailles ici!» 

Le Règlement Local de Publicité concerne également les enseignes de commerces et toute activité s’affichant dans l’espace public. Il a été fait le choix d’une forme de bon sens énergétique, selon lequel, hors périmètres particuliers, la fin d’une activité commerciale doit s’accompagner de l’extinc-tion de son enseigne. Un peu comme on éteint la lumière en quittant une pièce, on éteint la lumière en fermant sa boutique. Exception faite sur les centres-villes et secteurs culturels, où l’éclairage de l’enseigne est toléré jusqu’à 23 heures même si le lieu est fermé au public, au bénéfice d’une ambiance de quartier animée et faisant office de publicité gratuite pour les commerces et services de proximité. Évidemment, les grandes zones commerciales de périphérie ne sont pas concernées par cette exception. 

Le numérique énergivore banni de la Métropole de Lyon 

En réponse à la forte demande des citoyens et des associations, et dans la mise en application de notre engagement de campagne, nous confirmons l’interdiction de la publicité numérique. Selon les informations des publicitaires que nous avons pu nous procurer, un panneau numérique de 2 m2 consomme 5,4 MWh d’électricité par an, soit plus que la consommation électrique d’un ménage français (4,5 MWh). Il s’agit aussi du double d’un panneau classique, dont l’éclairage est encore au néon. Un panneau numérique de 8 m2 consomme lui 7 fois plus qu’un panneau classique. Le développement de l’éclairage par LED disqualifie définitivement les améliorations d’efficacité énergétique des panneaux numériques. La prochaine étape dans le Règlement Local de Publicité sera de réglementer, voire d’interdire totalement, les publicités numériques dans les vitrines des commerces, comme la Loi Climat et Résilience le permet depuis août 2021. 

Moins de biens, plus de liens 

La publicité temporaire de taille exceptionnelle, soumise à approbation du ou de la maire et de la Commission Départe- mentale Nature, Paysages et Sites, est le seul dispositif que nous avons souhaité assouplir par rapport au travail mené par l’ancienne majorité. Ces dispositifs doivent être en lien avec un événement, installés au maximum un mois avant l’événement et déposés dans les deux semaines suivantes. La culture, le sport, le monde associatif sont les principaux bénéficiaires de ces événements, et, par extension, la cohésion sociale. Nous pensons que la multiplication des événements et leur bonne diffusion dans l’espace public peuvent contribuer à extraire les citoyens de leurs écrans, de leurs voitures ou des centres commerciaux ; autant de cobénéfices pour la sobriété énergétique.